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Vers une généralisation de la prévoyance collective ? 

La réforme de la protection sociale complémentaire (PSC) en cours dans le secteur public aurait-elle inspiré le secteur privé en matière de prise en charge des risques prévoyance ? En tous cas, le thème de la prévoyance non-cadres est inscrit dans l’agenda social des partenaires sociaux. Il est prévu dans la partie dite autonome de l’agenda social, qui sera donc traitée uniquement entre représentants syndicaux et patronat, en parallèle des sujets entrant dans la lettre de cadrage de l’exécutif (emploi des seniors, compte épargne temps universel, assurance chômage, ...).
Ce sujet de la généralisation de la prévoyance est riche d’enjeux pour le secteur assurantiel. Le point dans cet article.


Prévoyance collective : une couverture inégale entre cadres et non-cadres
Aujourd’hui, seule la couverture prévoyance des salariés cadres est obligatoire pour toutes les entreprises du secteur privé. Cette obligation découle de l’article 7 de la CCN de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, repris par l’Accord national interprofessionnel (ANI) prévoyance des cadres du 17 novembre 2017.

Dans le détail, l’accord impose aux employeurs d’assurer leurs salariés cadres et assimilés en prévoyance par une cotisation égale à 1,50 % de la tranche de rémunération inférieure au plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS), soit 46 368 euros en 2024 (tranche 1).
En revanche, au niveau national, il n’existe aucun accord ou texte de loi imposant une règle similaire en ce qui concerne les non-cadres.
Les employeurs du secteur privé n’ont aucune obligation de souscrire au profit de ces salariés un contrat de prévoyance collective les couvrant contre les risques incapacité, invalidité et décès. En d’autres termes, la couverture des non-cadres est facultative pour les entreprises, sauf à ce qu’une convention collective ou un accord de branche la rende obligatoire. Dans ce cas, les employeurs sont tenus d’assurer les salariés visés (cadres et tout ou partie des non-cadres) en souscrivant un ou plusieurs contrats de prévoyance collective.
En 2022, seulement 200 branches sur 250 avaient signé des accords en prévoyance. Ces 200 branches couvrent 16,6 millions de salariés en prévoyance, soit 80 % des salariés du secteur privé selon le Centre technique des institutions de prévoyance (CTIP).
Ces accords n’imposent pas systématiquement la couverture de tous les risques. Si une garantie décès et une garantie invalidité 2ème et 3ème catégorie sont très majoritairement prévues, la couverture du risque incapacité ou invalidité 1ètre catégorie est moins étendue.
Le niveau des prestations ou de la contribution de l’employeur est également variable selon les accords.
Cette inégalité de couverture entre les populations cadres et non-cadres est ainsi plus ou moins importante selon les secteurs d’activité concernés : certaines branches sont très bien couvertes tandis que d’autres ne le sont pas ou pas suffisamment.
L’extension de la prévoyance complémentaire à tous permettrait de ramener de l’équité.

Face à la faiblesse ou à l'absence des garanties couvrant les non-cadres en prévoyance, une réflexion sur la généralisation de la prévoyance était attendue depuis de nombreuses années. D’ailleurs, l’ANI du 11 janvier 2013 prévoyait que, à l’issue du processus de généralisation de la complémentaire santé, les partenaires sociaux s’attaquent à la question des couvertures des risques lourds en matière de prévoyance pour tous les salariés en étant dépourvus.

Malgré cela, depuis une dizaine d’années, rien n’a vraiment bougé.
Les discussions à venir entre organisations syndicales et patronales sur ce sujet pourraient bien faire avancer les choses. S’il s’agit avant tout de réaliser un diagnostic, l’objectif à atteindre est, pour de nombreux partenaires sociaux, la généralisation de la prévoyance collective.
Quant à la forme que celle-ci pourrait prendre, plusieurs hypothèses ont d’ores et déjà été évoquées, notamment :
  • Une cotisation minimale égale à 1,5 % de la tranche de rémunération inférieure au plafond de la Sécurité sociale. C’est le pendant de ce qui existe aujourd’hui s’agissant de la prévoyance des cadres ;
  • Ou encore la mise en place d'un socle minimal de garanties couvrant de manière satisfaisante tous les actifs et leur permettant de faire face aux aléas de la vie.

Généralisation de la prévoyance complémentaire : des enjeux nombreux pour le secteur de l’assurance


La question de la généralisation de la prévoyance dans le secteur privé présente des avantages indéniables pour le secteur de l’assurance.

En effet, aujourd’hui, en prévoyance collective, on observe une dégradation des résultats techniques. Mettre en place une couverture pour tous permettrait aux organismes assureurs d’augmenter la masse assurable. Il serait alors possible pour ces derniers de mutualiser davantage et de mieux maîtriser les hausses de tarif.
Pour certains acteurs du secteur, ce serait également l’opportunité de développer des solutions en prévoyance moins onéreuses et plus attractives pour les assurés.
Malgré ces différents atouts, certains émettent des réserves quant à la généralisation de la prévoyance collective. En cause : la standardisation des garanties à laquelle elle pourrait conduire. Or, les besoins en prévoyance ne sont pas les mêmes selon le secteur d’activité et la taille de l’entreprise. Ainsi, afin de proposer une protection adaptée à ces différents paramètres, d’aucuns préconisent de laisser la possibilité aux branches et aux entreprises de négocier la couverture prévoyance en fonction de leurs spécificités, de leurs domaines d'activité et de leur personnel, complétant ainsi le socle qui serait établi au niveau national.