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PREVOYANCE DES CADRES

Le totem du « 1,50 % patronal » est tombé

La nouvelle Convention collective nationale de la métallurgie, en date du 7 février 2022, est venue rebattre les cartes dans le champ de la prévoyance collective. Et pour cause, c’est la première fois qu’un accord de branche permet que le financement de l’employeur à la prévoyance des cadres et assimilés soit inférieur à 1,50 % de la tranche de rémunération inférieure au plafond annuel de la Sécurité sociale.
En faisant tomber ce totem, la branche de la Métallurgie pourrait bien modifier les pratiques du marché sur la question.

Prévoyance des cadres : quelles obligations pour l’employeur ?*


L’article 7 de la CCN de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, substituée par l’Accord national interprofessionnel (ANI) prévoyance des cadres du 17 novembre 2017, impose à l’employeur d’assurer ses salariés cadres et assimilés en prévoyance par une cotisation égale à 1,50 % de la tranche de rémunération inférieure au plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS), soit 43 992 euros en 2023 (tranche 1).

Ce prélèvement, aussi appelé « 1,50 % patronal » est à la charge exclusive de l’employeur et doit servir à financer, en priorité, la couverture du risques décès. Autrement dit, au moins 0,76 % de cette cotisation doit être affectée à des garanties décès. Le reste de la cotisation peut donc servir à couvrir d’autres risques de prévoyance dont : invalidité, incapacité ou encore dépendance (perte d’autonomie). 

À noter : juridiquement, la Cour de cassation (Cass. soc., 30 mars 2022, n°20-15.022) confirme que l’excédent de la cotisation peut également servir au financement de la garantie frais de santé. En pratique, c’est à déconseiller en raison des dispenses d’adhésion qui peuvent aboutir à un financement patronal inférieur au 1,50 % pour les salariés non couverts par la complémentaire santé d’entreprise.

L’employeur qui n’est pas à jour de ses cotisations ou qui n’a pas souscrit de contrat de prévoyance collective pour ses salariés cadres et assimilés s’expose à une sanction financière. Celle-ci peut être lourde de conséquences pour l’entreprise : verser l’équivalent de 3 PASS à la famille du salarié décédé (soit 131 976 euros en 2023, plus les cotisations sociales).

Vers la possibilité de déroger au « 1,50 % patronal » ?

En février 2022, les négociateurs de la branche de la métallurgie (CFDT, CFE-CGC, FO et l’UIMM) ont signé une nouvelle convention collective nationale (CCN). Cet accord, qui couvre environ 1,6 million de salariés, fait actuellement beaucoup parler de lui car, en plus d’ouvrir le bénéfice de la prévoyance à l’ensemble des salariés non-cadres, c’est la première fois que des négociateurs de branche s’appuient sur le Code du travail pour définir une nouvelle norme de minimum de cotisations patronales pour les cadres. 

En effet, l’article 166-2 de cette convention, dont les dispositions sont entrées en vigueur au 1er janvier 2023, fixe le financement patronal minimal de la couverture prévoyance à 1,12 %, mais pour une assiette étendue à la tranche 2 (jusqu’à 351 936 euros en 2023) pour les cadres et assimilés, dont 100 % doit être pris en charge par l’employeur. 

Cette nouvelle cotisation se substitue donc au 1,50 % sur une assiette plafonnée à 1 PASS (43 992 euros en 2023, tranche 1), soit une baisse de 0,38 point. 

En parallèle, l’accord ouvre le bénéfice de la prévoyance à l’ensemble des salariés non-cadres avec une cotisation minimale de l’employeur fixée à 0,6 % de la rémunération dans la limite de 351 936 euros en 2023 (tranches 1 et 2).

Est-ce valable juridiquement ? Sur quel fondement ?

Pour ne pas appliquer cette obligation issue de l’ANI prévoyance de 2017, les négociateurs de branche se sont appuyés sur l’article L.2252-1 du Code du travail. Selon cet article, un accord de branche peut prévoir des dispositions moins favorables aux salariés qu'une convention collective ou un accord couvrant un champ d'application plus large, sauf à ce que cet accord ou cette convention stipule expressément qu’on ne peut y déroger en tout ou partie.

Comme l’ANI de 2017 n’interdit pas expressément de déroger à cette obligation de cotisation à hauteur de 1,50 % pour le financement de la couverture prévoyance des cadres, il est possible qu’un accord de branche comporte des stipulations moins favorables aux salariés que celles prévus par l’ANI.

En l’espèce, les négociateurs de la métallurgie pouvaient donc valablement faire le choix dans leur nouvelle convention collective de diminuer la cotisation cadre pour élargir la prévoyance à tous les salariés non-cadres. « Avec la convention, 100 % des salariés seront couverts, et un grand nombre le sera beaucoup mieux qu’aujourd’hui »* , se félicitait en juin dernier le directeur de la protection sociale à l’UIMM, Franck Duclos. 

En utilisant, pour la première fois, cette faculté offerte par le Législateur, la branche métallurgie pourrait bien changer les habitudes du marché sur cette question. Affaire à suivre.

Attention toutefois, cette dérogation ne peut être négociée qu’au niveau des branches professionnelles. Sans un tel accord, une entreprise ne peut pas décider à son seul niveau de conditions moins favorables que celles fixées par l’ANI prévoyance cadres de 2017.


  * Le magazine du Ctip, n°76 / juin 2022 / page 5